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LES CARTOMANCIENNES

de Robert Doisneau : regards croisés sur le destin et le mystÚre

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Introduction

Dans l’Ɠuvre foisonnante de Robert Doisneau, maĂźtre de la photographie humaniste, certaines sĂ©ries se distinguent par leur puissance narrative discrĂšte et leur poĂ©sie de l’étrange. Parmi elles, « Les Cartomanciennes », une sĂ©rie de portraits rĂ©alisĂ©s dans les annĂ©es 1940-50, nous plonge dans un univers fascinant : celui des voyantes, lectrices de cartes et femmes du peuple en dialogue avec l’invisible.

Contexte

La France de l’aprĂšs-guerre et les marges du visible En pleine pĂ©riode d’aprĂšs-guerre, dans une sociĂ©tĂ© en quĂȘte de repĂšres, les figures de cartomanciennes foisonnent dans les quartiers populaires de Paris. Doisneau, habituĂ© Ă  photographier les artisans, enfants, amoureux, mais aussi les marginaux, tourne ici son objectif vers une forme de spiritualitĂ© populaire, entre tradition et superstition. Il ne s’agit pas d’une sĂ©rie ironique, mais d’un hommage empreint de tendresse et de mystĂšre.

La série

Portraits de femmes en dialogue avec le destin Les clichĂ©s, souvent en noir et blanc, montrent des vieilles femmes, le visage ridĂ© par les annĂ©es, penchĂ©es sur des cartes, parfois dans des intĂ©rieurs sombres, Ă©clairĂ©es par une simple lampe. D’autres sont dans des arriĂšre-boutiques, ou derriĂšre un rideau, dans une atmosphĂšre de théùtre du quotidien.

Un théùtre de l’intime

Chaque scĂšne est minutieusement composĂ©e, mais conserve un aspect documentaire, presque volĂ©. On y ressent une intimitĂ©, une confiance accordĂ©e au photographe. Les regards sont souvent baissĂ©s ou absents, comme absorbĂ©s dans l’invisible.

Des gestes rituels, le geste de battre les cartes, de poser la main, de fixer un point invisible, revient comme un mantra visuel. Ce ne sont pas des charlatans mises en scĂšne, mais des femmes simples, investies d’un rĂŽle social : Ă©couter, rassurer, prĂ©dire.

Lecture symbolique

Entre rĂ©el et surnaturel Femmes de savoir : Les cartomanciennes sont souvent les seules femmes d’une rue Ă  « savoir » quelque chose, Ă  dĂ©tenir un pouvoir flou mais respectĂ©. Le regard de Doisneau ne les fige pas dans l’ésotĂ©risme folklorique, mais en fait des figures de sagesse populaire.

Entre passé et avenir

La cartomancie, telle que représentée par Doisneau, parle autant du temps qui passe que du temps à venir. Leurs visages marqués, leurs intérieurs surchargés, dialoguent avec la fragilité du destin humain.

Style Doisneau

Entre mise en scÚne et vérité Comme souvent, Doisneau joue sur la frontiÚre entre réalité brute et mise en scÚne douce. Il connaissait parfois ses modÚles, les faisait poser dans leur cadre réel, avec une grande sensibilité à la lumiÚre et aux objets du quotidien.

Une sĂ©rie encore mĂ©connue mais essentielle, si « Les Cartomanciennes » ne sont pas aussi cĂ©lĂšbres que ses photos d’enfants ou de baisers volĂ©s, elles touchent Ă  un imaginaire collectif profond : celui de la femme-oracle, de la destinĂ©e dĂ©voilĂ©e, et du quotidien chargĂ© de sacrĂ©.

Conclusion

Il s’agit d’une poĂ©sie de l’invisible Avec « Les Cartomanciennes », car Robert Doisneau, qui rĂ©alisa Ă©galement un portrait de la cĂ©lĂšbre Me Fraya, nous rappelle que la photographie peut capter plus que l’instant : elle peut capturer l’invisible, l’attente, le mystĂšre. Ces femmes anonymes, souvent oubliĂ©es de l’Histoire, deviennent sous son regard des archĂ©types vivants, Ă  la fois familiers et lointains.

Et si la cartomancienne n’était pas seulement celle qui lit les cartes, mais celle qui nous tend un miroir, fragile et vrai, de notre propre condition humaine ?

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RĂȘverie suave et rose. 1949